98e forum du CCHA consacré à la vie et l’œuvre de
Cora Robinet – Millet,
présentée par Gloria Godard
Cora Robinet nait à Paris en 1798 dans une famille bourgeoise, d’un père bourguignon et d’une mère nantaise. Rien ne la dispose alors à la carrière éclectique qu’elle allait suivre. La mort prématurée de sa mère alors qu’elle avait douze ans, a probablement contribué à forger son caractère. Attitude singulière pour une femme au XIXe siècle, elle choisit son époux, François Millet, qui est le frère de sa mère. Cette situation familiale particulière nécessite cependant une dispense obtenue du roi Louis XVIII. Son mari étant nommé sous intendant militaire à Châtellerault, le couple s’installe au domaine de la Cataudière, commune d’Availles-en-Châtellerault où, profitant de l’éloignement du mari pour raisons professionnelles, elle dirige le domaine et y installe une ferme. Quatre enfants naissent de cette union et ils profitent de l’esprit visionnaire de leur mère qui les élève de manière égalitaire, nous sommes alors dans les années 1830.
L’agronome
À partir de 1838, la sériciculture, l’art « d’éduquer » les vers à soie, va occuper une partie significative de sa vie en pays Châtelleraudais. Il s’agit d’installer une magnanerie et de développer cette activité originale au domaine. Cet élevage, partant de la couvaison d’œufs de papillons bombyx, passant par le nourrissage des larves et finissant par la récolte du fil enveloppant leurs cocons, le fil de soie, est complexe et peu diffusé en France. La méticulosité d’une femme et d’une mère est adaptée à cette activité permettant d’obtenir des résultats, progressifs et probants. L’alimentation de cet élevage avec des feuilles de murier blanc, nécessite la plantation de ces arbres en quantité adéquate sur les terres du domaine, soit deux hectares. Esprit innovant, elle s’essaie à la génétique des lépidoptères avec des résultats contrastés. La tentative de coloration des œufs pour obtenir du fil de soie coloré n’aboutit pas. Elle obtient par croisement une nouvelle race de papillon baptisée Cora.
Militante féministe avant l’heure, elle profite de la présentation de cette activité pour inciter les femmes à se mêler d’agriculture, premier pas vers l’émancipation.
En 1850 la Cataudière est vendue et la famille Millet se déplace en Touraine.
Chroniqueuse, femme de lettres et encyclopédiste
Son activité d’écriture est éclectique : conseils aux jeunes filles pour choisir un mari, puériculture, publication de manuels scolaires d’agriculture destinés aux filles.
Son œuvre majeure en 1845, La Maison Rustique des Dames est une véritable encyclopédie de la vie rurale au XIXe siècle : organisation des jardins potagers et fruitiers, choix de variétés, recettes et menus de repas pour chaque jour de l’année. Cet ouvrage sera l’objet de 20 éditions successives et sera traduit en trois langues.
En 1868 elle publie La Maison Rustique des Enfants. C’est un manuel d’éducation qui apprend les bonheurs simples de la vie rurale. Elle est adepte avec réserves de Jean-Jacques Rousseau car : « Ce n’est qu’un homme… »
Cora Robinet -Millet est admise en tant que première femme à la très masculine Société d’Agriculture. C’est aussi la première Française titulaire du grade de Chevalier du Mérite Agricole, le célèbre « poireau », en reconnaissance de son influence sur la profession.