Compte- rendu du forum du 26 mai

Résidant dans un autre département et une autre région, c’est en voisin que monsieur Romain Taillefait, responsable de la Maison du Souvenir de Maillé, est venu le samedi 26 mai nous remémorer une page douloureuse de notre histoire : 25 août 1944, Maillé. Histoire et mémoire d’un massacre oublié.

Il nous a tout d’abord proposé un film d’1/2 heure composé de témoignages de survivants recueillis en 1984 : l’arrivée des allemands dans le village, les exactions et le massacre systématique (124 victimes), la volonté d’écraser le village par une destruction au canon. Le film évoque aussi le procès en 1952 mais largement passé sous silence, la reconstruction rapide du village grâce à l’aide financière d’un couple d’Américains, la mémoire vive ou obturée des survivants durant toutes les années d’après-guerre.

A l’issue de ce film très émouvant car fondé sur l’humain, le conférencier replace l’événement dans le contexte national : débarquées le 6 juin en Normandie, les troupes alliées descendent vers la Loire tandis que d’autres gagnent Paris qu’elles libèrent ce même 25 août. Puis, à l’aide de cartes aériennes du village et de ses environs,  il expose les caractères et le déroulement chronologique de l’événement : la présence, à proximité, du camp de Nouâtre dont les troupes allemandes ont fait une base de ravitaillement – les sabotages en août 1944 sur la ligne de chemin de fer traversant la commune – une fusillade improvisée contre deux voitures allemandes dans la soirée du 24 août – la venue de troupes allemandes en provenance de Châtellerault très tôt le matin du 25 et qui doivent se cacher dans un bois pour échapper au mitraillage de l’aviation alliée sur un convoi ferré – l’entrée de la colonne allemande vers 9 h 30 par le sud du village – le massacre systématique, y compris dans les fermes isolées jusqu’à midi, avant le retour à Châtellerault – le bouclage des lieux par un cordon de troupes – le pilonnage par l’artillerie allemande de la partie nord du village.

Monsieur Taillefait a ensuite choisi de donner la parole aux membres du public. Un témoignage émouvant est apporté par un auditeur de la conférence, âgé de 10 ans en août 1944 et présent à moins de deux kilomètres de Maillé. Les questions principales portent sur les auteurs du massacre, leur provenance, leur motivation, les manifestations et les raisons de l’« oubli » auquel le village a dû faire face durant des décennies, le rôle de la Maison du Souvenir. Le conférencier y répond point par point en s’appuyant sur des documents sélectionnés. Il s’agit d’éléments de la 17e Panzer Grenadier Division SS Götz von Berlichingen, stationnés à Châtellerault, présence tragiquement confirmée par l’exécution le même jour de cinq personnes près du lycée Berthelot par d’autres membres de cette division. La volonté est de frapper pour terroriser, faire pression. D’autres villages frôlent le massacre : Bonnes, Bonneuil-Matours. A partir de juin 1944, la France est considérée comme terre hostile, l’Allemagne pense qu’elle peut encore gagner la guerre mais qu’il faut imposer la terreur comme à Ascq, Tulle et Oradour. Alors que ce dernier a été pris en charge sur le plan mémoriel dès 1946 pour en faire un symbole, un exemple, rien de tel pour Maillé, et la mémoire est enfouie dans les terrassements de la reconstruction pour 50 ans.

Depuis 1994, les archives départementales, des historiens Français, Anglais, Allemands travaillent sur la question ; un comité d’habitants s’est mis en place débouchant sur la création de la Maison du Souvenir. Au-delà de la relation des faits et de l’expression des témoignages, sans rien occulter de la violence, elle s’emploie à œuvrer au rapprochement des jeunesses françaises et allemandes dans une Europe en paix.

 

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Association fondée en 1999, le C. C. H. A. vise à la découverte, la sauvegarde et la promotion du patrimoine documentaire du Pays châtelleraudais.
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