Ce fut une journée très chargée pour le CCHA ! Après l’assemblée générale, une exposition était présentée par Bernard Poignand et Marie-Christine et Claude Ligeard.
Si Bernard exposait des équipements, décorations et souvenirs de la Grande Guerre, Marie-Christine et Claude nous proposaient de découvrir la vie de Robert Gemehl, un p’tit gars de Tivoli qui vécut la Première Guerre mondiale.
Ces souvenirs nous faisaient revivre une page d’histoire montrant, s’il en était besoin l’importance des archives familiales.
Les deux expositions, clichés de G. Millet
Propos sur la conférence
C’est avec plaisir que le Centre Châtelleraudais d’Histoire et d’Archives recevait ce samedi 18 octobre un « récidiviste » comme s’en amuse la Présidente, Claudine Pauly, lors de la présentation du conférencier. Jacques Bouquet, historien local reconnu, est déjà venu à plusieurs reprises partager le fruit de ses recherches avec les Châtelleraudais.
« La participation à l’effort de guerre en 1914-1918 dans le châtelleraudais » a captivé l’auditoire. Les trois points développés : participation au titre de la solidarité, effort économique et effort patriotique ont été largement illustrés d’exemples vécus que nous évoquerons ici.
Après avoir dressé un bilan démographique et économique à la veille de la guerre, Jacques Bouquet aborde les manifestations de solidarité qui se mettent en place dès 1914.
On voit rapidement apparaître des comités de secours aux blessés avec la création d’hôpitaux temporaires ainsi que des comités d’assistance aux hôpitaux militaires destinés à recueillir des fonds. Le maire de Châtellerault, Admira Derouau, médecin, collecte des pansements, des gilets de flanelle et du linge pour les soldats blessés. En janvier 1916, la municipalité vote une aide financière à répartir entre les différentes structures hospitalières installées en ville. Et pour entretenir le moral des blessés, le personnel de la manufacture d’armes fait du théâtre : on paie son entrée et on donne à la quête pour les bonnes œuvres.
On rencontre aussi un peu partout des réfugiés du nord de la France et de Belgique qui ont fui les zones de combats. Des accueils leur sont proposés et on cherche à leur donner du travail pour pallier l’absence des hommes mobilisés.
A Montmorillon, un instituteur belge remplace dans sa classe, le maître parti à la guerre…
A Châtellerault, un prêtre fait son prône en Flamand pour les Belges…
Un comité d’aide aux réfugiés du Nord organise des concerts pour venir en aide aux familles nécessiteuses… Mais il faut aussi penser aux soldats du front à l’approche de l’hiver : les femmes et les fillettes des écoles se mettent à tricoter des pulls, des gants, des chaussettes et des cache-nez… On achemine également vers le front pommes de terre et haricots par chemin de fer. En 1915, un comité départemental de secours aux prisonniers fait parvenir des colis aux soldats.
Sur le plan économique, des efforts sont demandés à l’échelon national en lien avec les dépenses de la guerre. On propose à la population de participer à des emprunts et à une collecte d’or… En 1915 et 1916, est créée «La journée du poilu ». Des écoliers se cotisent même pour acheter des ballons afin de distraire les hommes des tranchées…
Dans les campagnes, les chevaux, les bœufs, le foin et la paille sont réquisitionnés, des vaches aussi, ainsi que des productions végétales, des pommes de terre en particulier.
On assiste alors en réaction, à un effort important dans le monde agricole si bien que les rendements ne diminuent pas : les femmes remplacent les hommes aux champs et on voit se multiplier dans nos campagnes, les ânes et les mulets plus faciles à mener pour elles que les gros chevaux de labour.
En 1917, le ministre de l’Agriculture demande aux écoles de cultiver des espaces de terre jusque-là négligés. A Oyré, par exemple, les fleurs des parterres sont arrachées pour planter pommes de terre et topinambours… Les enfants de la maternelle de Montbernage à Poitiers élèvent des lapins qui seront vendus au profit des Pupilles de Guerre.
Quant à l’effort patriotique, il concerne surtout le 32e Régiment d’Infanterie de Châtellerault et le 125e de Tours, souvent ensemble au combat et qui seront de toutes les batailles.
Le 32e RI envoyé en Moselle pour défendre Nancy, est présent à la 1ère bataille de la Marne où les Allemands sont repoussés. On le retrouve à Ypres puis à Verdun et dans la Somme en 1916. En 1918, il participe à la deuxième bataille de la Marne, là où le front allemand est enfoncé conduisant à la victoire.
La lecture émouvante d’un extrait du journal de marche du 32e RI, à Verdun à la fameuse cote 304, est faite par Jacques Bouquet : en mai 1916, des soldats par centaines se font tuer par les tirs ennemis, les blessés ne peuvent être secourus, des galeries de tranchées s’effondrent sur les hommes, le ravitaillement n’arrive plus…
Tous ces morts, toutes ces disparitions, les conditions atroces des combats font déplacer le président Poincaré et le roi des Belges qui rendent visite aux soldats sur le front.
Malgré quelques mutineries, le 32e RI s’est conduit au cours des combats de façon exemplaire. Il est cité en août 1917 à l’ordre de l’armée à titre collectif par le maréchal Pétain. En 1915, il avait déjà reçu une citation avec « croix de guerre ». A cette occasion, des écoliers d’une école de Châtellerault s’étaient cotisés pour offrir au régiment une croix en or… Enfin, en septembre 1918, nouvelles félicitations de Pétain qui permet aux soldats du régiment de porter la fourragère aux couleurs rouge et verte de la croix de guerre.
Partout en France le bilan des pertes est catastrophique comme dans l’arrondissement de Châtellerault. L’agriculture, l’économie auront du mal à repartir mais on peut constater que des efforts ont été faits dans tous les domaines et par tous au cours de ces quatre années de guerre afin d’aider et de soutenir les plus touchés par ce terrible conflit.
Jacqueline Gagnaire
L’assistance pendant la conférence, cliché de G. Millet